Les effets du lieu de résidence sur l’accès à l’emploi : une expérience contrôlée sur des jeunes qualifiés en Ile de France
L’objet de cette étude est d’évaluer la discrimination à l’embauche à l’encontre des jeunes en Ile-de- France à travers trois dimensions : l’effet de la réputation du lieu de résidence, l’effet du sexe et l’effet de l’origine (française ou marocaine). L’étude est réalisée sur données expérimentales de testing selon un protocole permettant d’examiner les effets croisés de ces trois dimensions, que l’on dénomme discrimination conditionnelle. On s’intéresse aux discriminations pour une profession qualifiée et en tension, les informaticiens de niveau BAC+5, pour laquelle les discriminations devraient a priori être très réduites. Pour cette profession, nous avons construit 12 profils fictifs de candidats à l’emploi similaires en tout point à l’exception de la caractéristique testée. Nous examinons la discrimination territoriale en localisant les candidats fictifs dans trois communes du Val-d’Oise : Enghien-les-Bains (réputée favorisée), Sarcelles (réputée défavorisée) et Villiers-le-Bel (réputée défavorisée et ayant connu des émeutes urbaines médiatisées en 2007). Entre mi décembre 2008 et fin janvier 2009, nous avons envoyé 3684 candidatures en réponse à 307 offres d’emploi. L’étude consiste en une exploitation statistique et économétrique des réponses à ces envois. Nous trouvons trois résultats principaux qui confirment tous la présence de discrimination conditionnelle pour une profession en tension. Premièrement, si dans l’ensemble, l’origine marocaine n’est pas discriminante pour les hommes, elle est pénalisante lorsque les candidats résident à Sarcelles : les hommes y ont de plus faibles chances d’être invités à un entretien d’embauche pour un poste en CDI et les femmes y ont de plus faibles taux de succès quel que soit le profil du poste. Deuxièmement, le sexe des candidats exerce un effet distinct sur les chances de succès des candidats d’origine marocaine résidant à Sarcelles d’une part, et celles des candidats d’origine française résidant à Enghien-les-Bains d’autre part. Les femmes sont pénalisées dans le premier cas et au contraire favorisées par rapport aux hommes dans le second cas. Troisièmement, nous trouvons une discrimination territoriale qui affecte exclusivement les femmes. Résider dans une commune défavorisée (Villiers-le-Bel ou Sarcelles) plutôt que dans une commune favorisée (Enghien-les-Bains) réduit la probabilité d’une candidate d’accéder à un entretien d’embauche. Nous trouvons une pénalité plus importante au fait de résider à Villiers-le-Bel pour les candidates d’origine française : elles sont pénalisées lorsqu’elles vivent dans cette commune défavorisée qui a connu en 2007 des émeutes urbaines médiatisées, plutôt qu’à Sarcelles, commune également défavorisée mais qui a été moins médiatisée. Nos résultats montrent que les femmes d’origine française sont les plus affectées par la discrimination territoriale.
Year of publication: |
2010-05
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Authors: | Duguet, Emmanuel ; Yannick L’Horty ; Parquet, Loïc Du ; PETIT, Pascale ; SARI, Florent |
Institutions: | Centre d'Études des Politiques Économiques (EPEE), Université d'Évry Val d'Essonne |
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